Témoignages |
- Hildegarde de Bingen
- Charles Delhez, L'Eglise, un système qui s'effondre
- Michel Delpech, Recherche d'une vie unifiée
- Vincent Lebbe, un homme exceptionnel
- L'abbé Froidure, quel personnage!
- Un pionnier (Roger Schütz)
- On ne voit bien qu'avec le coeur
- Regard sur la vie
- Espérances d'un croyant : L'abbé Pierre
- Nos mains : Georges Bernanos
- Didier Rimaud : troubadour de Dieu
- Marie Laforêt
- François Martou
- Soeur Emmanuelle
- Monsieur Vincent
Hildegarde de BingenHildegarde de Bingen. Abbesse de Bingen (au bord du Rhin). Si vous passez à Bingen ( ville allemande de Rhénanie-Palatinat ), on y trouve encore les tisanes et remèdes qu'elle proposait. O vis aeternitatis |
Charles Delhez : L'Eglise : un système qui s'effondre |
Les affaires de pédophilie, d'abus sexuels, de double vie, de destruction de dossiers compromettants en sont le révélateur. Se transformer radicalement ou mourir, tel est le choix.
L'Église ne va pas bien, l'Église catholique. Les affaires de pédophilie, d'abus sexuels, de double vie, de destruction de dossiers compromettants qui éclatent dans la presse en sont le révélateur. Une culture de l'abus et du silence s'est mise en place, un système s'est érigé à l'opposé du message originel. Jusqu'au sommet de l'Église, éclate en plein jour des incohérences qui semblent parfois totales. La crise est d'envergure. Il reste sans doute de fidèles serviteurs, mais les scandales sont décidément trop scandaleux.
En matière de pédophilie, la loi de l'omerta a régné et règne sans doute encore. On a trop souvent fait passer l'institution avant les victimes elles-mêmes. Mais ce n'est pas de ces drames que je veux parler ici, mais du système lui-même. L'Église, qui a l'habitude d'inviter le monde entier à la conversion, devrait comprendre que c'est d'une transformation radicale qu'elle a elle-même besoin. Le Pape a pris amplement la mesure de cette crise majeure et a rassemblé, à Rome, les hauts dignitaires de l'Église. Ce sommet laisse encore les victimes sur leur faim et l'on attend les mesures de définitives, ainsi que la vérification par les actes. Mais c'est quand même un pas important.
Cela dit, c'est tout le système qu'il faut revoir. L'Église, dans son organisation, est devenue un corps de spécialistes qui font carrière. Elle s'est structurée à la verticale, de manière pyramidale et hiérarchique, nous imposant des pères et des maîtres. Le pape François, dans des mots parfois très durs, stigmatise ce cléricalisme. C'est précisément ce que Jésus a combattu. Il voulait faire de nous tous des frères. " Scribes et pharisiens hypocrites ", clama-t-il.
C'est à tout le système que j'en veux, un système qui atteint sa limite extrême et qui étouffe le meilleur de ces personnes qui se sont engagées à son service. Un système qui, dans le cadre de la pédophilie, est devenu criminel. Tout doit donc changer. Et c'est une question tellement plus vaste que l'ordination des hommes mariés : n'a-t-on pas donné trop de pouvoir aux prêtres ? Et ils se sont laissé faire ! Le pouvoir a en effet ses charmes.
Se transformer radicalement ou mourir. Tel est le choix. On a mis trop de poids sur les rites, les dogmes, la hiérarchie, oubliant que le christianisme est un style de vie, celui de Jésus, et un art de vivre en société dans la fraternité et l'entraide. Le Christ n'est pas venu fonder une institution de plus. Il a voulu toucher le cœur de l'homme.
La situation actuelle m'attriste profondément, car c'est mon Église et le Christ lui-même y est en souffrance. Ne généralisons cependant pas. Même si le système est obsolète, il y a toujours des anonymes qui vivent de l'Évangile et qui empêchent le monde lui-même de sombrer. Et il y a aussi des signes d'espoir : le courage du pape François et tout simplement le fait que ses affaires apparaissent enfin au grand jour. Heureusement, dirait le cardinal De Kesel, que tout cela est arrivé à la connaissance du public…
Je ne voudrais pas pour autant me désolidariser du corps quand il est blessé. Au contraire. L'Église n'a jamais eu autant besoin de nous. Rappelons qu'elle n'est pas une institution, mais une koinonia , c'est-à-dire un réseau de petites communautés qui, à la base, essayent de vivre de l'Évangile. Un minimum de structure est nécessaire pour maintenir la communion, sans doute, mais il faut qu'elle reste la plus légère possible et ne détourne pas le regard de l'essentiel.
J'y reste donc alors que certains font le choix de l'apostasie. On ne s'engage d'ailleurs jamais que pour des causes imparfaites, celles qui sont parfaites n'ont pas besoin de nous ! J'y reste parce que j'y ai reçu le meilleur, l'Évangile, et que je continue à y vivre le meilleur de moi-même. N'est-elle pas, pour moi, non pas d'abord une institution, mais des liens, une multitude de visages, de personnes qui comme moi veulent mettre leurs pas dans les pas de Jésus, chacun faisant de son mieux?
Michel Delpech : Recherche d'une vie unifiée |
Michel Delpech, chanteur compositeur à grand succès depuis les années 60-70, nous a quittés le 2 janvier 2016.
A 12 ans, le jour de sa première communion, il s'est senti envahi par un amour absolu.
A 18 ans, il se lance dans une carrière de chanteur avec des tubes qui le font connaître et apprécier dans le showbiz. Sa carrière de chanteur est bien lancée. Et peu à peu il s'éloigne de la foi.
Mais quelques années plus tard, les questions existentielles l'assiègent et il se met en quête d'autres sphères spirituelles : méditation transcendantale, mystiques orientales… sans y trouver la paix intérieure. Il surfe sur la vague hippie, sombre alors dans l'alcool, la drogue. Survient une dépression qui sera pour lui une longue traversée du désert. La séparation d'avec Chantal Simon, son épouse, va se révéler douloureuse. Chantal se suicide peu après. Il faudra sept ans à Michel pour sortir du marasme.
Mais sa recherche existentielle, il la poursuit. Il lit la vie des saints et décide d'un séjour à l'abbaye de Saint-Wandrille en Normandie. Il y rencontre le frère Odon, un jeune moine dont le témoignage entendu à la télévision l'avait interpellé. Un homme dont le parcours était proche du sien et qui devient son confident. Il retrouve alors la foi et est saisi par la beauté des offices monastiques. Il a 35 ans.
Lors d'un voyage à Jérusalem, il arrive au tombeau du Christ : "Quelque chose s'est allumé. J'ai eu l'impression d'être arrivé à destination, à un endroit où l'on pose ses valises." dit-il. Il est envahi d' une immense paix. Jésus est devenu pour lui comme un frère, simplement et sans solennité. Ces quelques minutes passées au Saint-Sépulcre ont déterminé la suite de sa vie.
Il a 39 ans et vient d'épouser Geneviève Garnier-Fabre en seconde noce dans une petit église copte de Paris.
Ses premiers succès - "Chez Laurette" (1965), "Pour un flirt"(1971), "Le Loir et Cher" (1977) lui avaient valu de se présenter en star de la chanson française. Il y chantait la vie, le bonheur, l'amour
Ensuite c'est le trou noir. Il reste effacé. Mais en 2006, il fait son retour au devant de la scène et se produit, entre autres, au Bataclan, à Paris.
Début mars 2013, il est atteint d'un cancer de la langue et de la gorge . Il révèle alors au grand jour sa foi chrétienne vécue en union avec sa femme Geneviève et il publie un livre "J'ai osé Dieu" , paru aux Presses de la Renaissance. "Oser croire, c'est prendre un risque, dit-il, car il est plus facile de ne pas croire ".
Les épreuves de la vie n'ont pas entamé sa confiance en Dieu. "Je ne suis jamais en colère contre Dieu, dit-il, parce que je crois que ce qui m'arrive est ce qui doit m'arriver".
Il se reconnaît chrétien, va de temps en temps à la messe, mais n'est pas un pratiquant assidu. Il se sent chrétien, mais ni orthodoxe, ni copte, ni catho. Il se sent à l'intérieur de toutes ces Eglises à la fois. Les grands docteurs de l'Eglise le passionnent : Saint Jean de la Croix, Sainte Thérèse d'Avila... Surtout Saint Augustin resté si proche de lui à travers ses "Confessions" . Un livre qu'il juge extrêmement moderne et dont il cite volontiers la phrase "Aime et fais ce que tu veux". Là, tout est dit; c'est la seule chose à faire. s
Vincent Lebbe, un homme exceptionnel ! |
Né à Gand en 1877, il s'intéresse dès l'adolescence à la Chine et se passionne pour les causes justes. Ce goût de la justice, jamais il ne s'en départira.
Il rêve de partir en Chine. Les missionnaires Lazaristes y sont actifs. Il devient Lazariste. Fait des études de théologie chez les Prêtres de la Mission de Paris. A Rome, il rencontre Mgr Favier, évêque Lazariste rentré de Chine. Il interrompt ses études et le voilà parti pour ce pays lointain. Son nom chinois sera Lei-Ming-Yann, "le tonnerre qui chante au loin"!
Il veut se faire chinois parmi les chinois. Il écrit : " On ne connaît les hommes qu'en se faisant l'un d'eux. " Il porte le costume chinois, la longue tresse et fume la pipe du pays. Les gens viennent à lui, de la ville comme de la campagne.
Certains évêques lui causent des difficultés et le critiquent au point qu'il songe à rentrer en Europe. Mais Monseigneur Durant, vicaire apostolique le soutient.
Infatigable, Vincent Lebbe va et vient. On le réclame partout pour l'écouter et bénéficier de son rayonnement, de sa gentillesse communicative, de son enthousiasme. Sous son impulsion, des écoles sont créées à travers le pays, du niveau Primaire au Supérieur.
En 1925, de sa rencontre avec le cardinal Mercier va naître l'idée d'un collège chinois à Louvain. Des prêtres y seront formés avant de se mettre à la disposition de l'Eglise de Chine, des prêtres naturalisés chinois, vrais chinois parmi les chinois.
Le 28 octobre 1926, le Père Lebbe assiste à Rome à la consécration des six premiers évêques chinois par Pie XI.
Le 8 août 1927, il sera naturalisé chinois.
De plus en plus de jeunes chinois désirent adopter la vie monastique. En décembre 1928, il fonde le monastère des Béatitudes près de Auch Wo et en devient le Père Abbé. Il fonde ensuite un monastère de Carmélites et renoue ainsi avec la tradition des grands fondateurs d'ordres.
En 1937, lors de la guerre contre le Japon, il se lance dans l'action humanitaire. Ses petits frères seront brancardiers. Tchang Kaï-Chek le nomme colonel pour les services rendus à la chine.
En 1939, il obtient que l'interdiction des rites chinois, qui datait de 1742, soit annulée par Rome. Et cela, 20 ans avant le Concile Vatican II. Extraordinaire précurseur !
Lors de l'invasion communiste, il devra quitter la Chine, mais avec tous les honneurs. Le Général communiste Liu Po Ch'eng, surnommé le "Dragon Borgne", vient en personne lui faire ses adieux.
Epuisé par la maladie, Vincent Lebbe meurt le 24 mai 1940. Toute la Chine prend le deuil. Les drapeaux sont mis en berne. Tchang Kaï-Chek lui-même assiste à ses funérailles. On compte alors 24 évêques chinois. Deux décennies plus tard, le Concile Vatican II en accueillera 200.
Vincent Lebbe fut un géant de l'Eglise contemporaine, ouvert à toutes les cultures et toutes les religions. Le Cardinal Suenens a dit de lui:
"Il fut tout entier aux Chinois, jusqu'à l'épuisement de ses forces.
C'est le sort des prophètes de venir avant l'heure. C'est un des grands inspirateurs du Concile Vatican II et qui a donné à l'Eglise le visage d'une pleine ouverture à tous les peuples' ."
Paul Spies
(article inspiré des réflexions de son ami l'abbé Froidure).
L'abbé Froidure, quel personnage! |
Né à Ypres, le 22 avril 1899, Edouard Froidure a traversé le 20e siècle en mettant toutes ses énergies humaines et spirituelles au service des plus déshérités.
Dès l'adolescence, sa sensibilité de pédagogue perçoit les lacunes du système éducatif. Les écoles catholiques de l'époque soumettaient les jeunes à un rythme de présence obligatoire aux offices religieux, matin, midi et soir. Cette "piété à tout prix" engendre le dégoût. Un manque total de psychologie. "Qui sème trop dense, disait-il, récolte trop maigre".
La grande guerre éclate. Il a à peine 17 ans et s'engage comme artilleur dans la bataille de l'Yser. Il s'y fait remarquer, risquant sa vie à plusieurs reprises. Il sera victime du "gaz moutarde" diffusé par l'armée allemande mais en sortira vivant. La guerre lui enseigne des gestes d'humanité envers les enfants et familles de réfugiés et aussi envers les blessés des deux camps.
Un entretien avec le cardinal Mercier fait naître en lui le désir d'être prêtre. Etudes à St-Louis à Bruxelles puis à Rome. Là, il est confronté à la misère profonde du peuple de cette grande cité.
De retour en Belgique, il sera un témoin privilégié des premières tentatives oecuméniques. Le voilà aux premières loges des "Conversations de Malines" auprès de l'abbé Portal, Lord Halifax et le Cardinal Mercier. Décembre 1921, mars 1923 où il est rejoint par Joseph-Ernest Van Roey (alors vicaire général), novembre 1923 et mai 1925. Ces "Conversations" furent le prélude à l'orientation oecuménique du Concile Vatican II. En 1966, le rapprochement avec les Anglicans culminera lors de la rencontre entre Paul VI et l'archevêque de Cantorbéry.
Pourtant, sa préoccupation première reste de sortir les enfants pauvres de leurs taudis. Il a l'idée de créer des lieux de vacances pour leur procurer un peu de bien être. En 1924, il organise des colonies de vacances à l'abbaye d'Averbode. Là, il rencontre le Père Vincent Lebbe, l'apôtre de la Chine, qui deviendra son ami.
Autres défis: de 1925 à 1931, il se lance, avec un première équipe d'enseignants, dans la création du "Collège Cardinal Mercier" de Braine-l'Alleud qui met en oeuvre des innovations pédagogiques en avance sur l'époque.
C'est là que le Père Marie-Albert Van der Cruyssen, moine cistercien et futur Abbé d'Orval, vient lui demander son aide. Il le conseille et sera un artisan dynamique de la résurrection de l'Abbaye d'Orval.
En Italie, il avait pu assister à la naissance du fascisme. En Belgique, il sera confronté à la suffisance d'un Léon Degrelle et de son mouvement d'extrême droite, le rexisme, qu'il combattra vigoureusement.
Nommé vicaire à la paroisse moribonde de Ste-Alène à Forest, il va découvrir la richesse morale des enfants de la pauvreté. Parmi eux, un petit liégeois atteint d'une grave infirmité et dont la sérénité le marquera pour la vie. Il crée des Centres d'hébergement et des plaines de jeux, ouvrant l'accès aux loisirs à des milliers d'enfants, d'abord à Bruxelles (à Uccle et au Parc Parmentier) puis à Waterloo et dans tout le pays. On les appellera "Les Petits sapins". Ils existent encore aujourd'hui.
En novembre 1936, notre diable d'homme décide de fonder une autre a.s.b.l. Son nom: "Les Petits Riens". Il loue un vaste garage, 3, rue aux Laines à Bruxelles, où s'entassent bien vite vêtements et mobilier reçus et recyclés. En précurseur de l'Abbé Pierre, il y engage 7 à 8 Sans-logis qui, par leur collaboration, vont lui permettre de trouver les ressources indispensables à l'hébergement des enfants les plus fragilisés. Cinquante ans plus tard, (en 1986) les Petits-Riens entretenaient jusqu'à 130 SDF au service des Maisons d'Enfants et de familles dans le besoin. Aujourd'hui, la Belgique compte encore une vingtaine de magasins gérés par "Les Petits Riens". L'abbé Froidure disait: " Ils bossent pour les gosses." Avec une dizaine d'autres associations, ils sont regroupés au sein de la "Fédération Abbé Froidure ".
1940: Voici que s'annonce la 2e guerre mondiale. Il est nommé aumônier de l'aviation belge et sera aux premières lignes du front pour porter secours aux blessés. Plus tard, il entre dans la Résistance. Des hommes traqués par la gestapo trouvent refuge dans son immeuble. Des enfants juifs sont cachés à l'Internat du Parc Parmentier. Réussir à nourrir 8000 bouches en pleine guerre, quelle performance! Sans compter les 1800 personnes qui bénéficient des secours des "Petits Riens".
Mais en 1942, il est arrêté, interrogé et torturé par la gestapo à la prison de Saint-Gilles. En août 1943, il est dénoncé et envoyé en Allemagne, où il ira d'un camp à l'autre pour connaître, en 1944, l'enfer de Dachau. Il y voit les pires atrocités et survivra miraculeusement jusqu'à l'arrivée des américains. A son retour en Belgique, il décide de révéler à l'opinion publique ce que fut Dachau. Ses conférences attirent les foules et les médias en font une large diffusion.
Durant les années d'après guerre, l'abbé Froidure déploie une intense activité et dénonce la misère qui se cache dans les taudis bruxellois. Il les fait visiter au ministre du logement, Monsieur De Taeye. Plus tard, il accompagne le roi Baudouin pour une visite "incognito" des taudis. Une visite aux énormes retentissements et qui fera démarrer la lutte contre les taudis.
Son livre "Parias 57" reçoit les "Prix des Bibliothèques" en 1959. Le comité qui lui décerne ce prix ne compte pourtant aucun catholique. Quel champion ce prêtre!
La même année, on lui demande de se rendre au Congo où la situation lamentable d'une jeunesse désoeuvrée pose de nombreux problèmes dans les grandes villes. La population l'accueille chaleureusement, mais les solutions inadaptées proposées par les autorités belges ne lui donneront pas le temps d'apporter les bons remèdes. "Nous avons commencé trop tard, dira-t-il, vingt ans trop tard pour empêcher les gosses de devenir des révoltés dans la rue."
A la fin de la journée du 10 septembre 1971, une rude journée toute consacrée à ses oeuvres, l'abbé Froidure est mortellement fauché par une voiture juste devant sa porte.
Une riche personnalité, un caractère bien trempé et un prêtre plein d'humanité, dont le regard était tourné vers les plus déshérités. L'arrivée du pape François l'aurait comblé de joie!
Je n'oublierai jamais sa voix claire que j'ai eu le privilège d'entendre un jour de 1957. Il parlait d'une vertu oubliée: la probité. On connaît les vertus d'honnêteté, de générosité, de charité... Mais la probité est bien moins connue. Une personne probe, fidèle au principe de la justice, c'était bien lui, Edouard Froidure.
Paul Spies
Texte inspiré du livre de Jo Gérard, "Interview historique de l'abbé Froidure", Ed, DSC, 1987.
Un pionnier (Roger Schütz)
« J'irais jusqu'aux extrémités de la terre, Roger SCHUTZ |
On ne voit bien qu'avec le coeur
« Nous ne sommes qu'un grain de sable,
Mais si chaque être faisait chaque jour un geste pour la paix, pour l'égalité et le respect de la vie, tout pourrait changer. »
« Lorsque mon frère Larry est mort, je n'arrivais pas à accepter ce vide sans fin. J'étais enragé. Puis, une nuit, j'ai fait un rêve. Une énorme boule de feu venait vers moi et une voix me disait : ‘Ne t'oppose pas.' Je me suis réveillé en sursaut. J'ai compris à ce moment-là que cette souffrance ne pouvait guérir qu'à travers l'amour que je portais en moi pour Larry. »
« Le Mahatma Gandhi a libéré un continent.
Martin Luther King a libéré un peuple.
Nelson Mandela a libéré un pays.
Qu'ont-ils de commun, sinon d'avoir choisi l'amour comme instrument ? »
Stevie Wonder
Chanteur américain engagé – 55 ans et aveugle.
Regard sur la vie
La foi m'a aidé à survivre lorsque ma fille a été victime d'un accident de voiture.
Evidemment, je ne crois pas à un type qui ferait le compte de nos bonnes et de nos mauvaises actions
Savoir ce qui va se passer après la mort ? A la vérité, je m'en fous. L'éternité, je la vis en ce moment, avec vous.
Quand les gens me disent : « Monsieur Serrault, merci. Vous m'avez aidé à vivre », Dieu est là, Dieu est amour.
La vie pour moi n'est qu'un passage et nous serons tous récupérés un jour.
Entamer quelque chose de nouveau tous les jours, résume ma philosophie dans l'existence.
Michel SERRAULT
Espérances d'un croyant : L'ABBE PIERRE |
Le dernier livre de l'abbé Pierre, « Mon Dieu… Pourquoi ? », Edition Plon, 2005 , est un témoignage peu commun.
Avec une totale liberté d'esprit, il livre ses convictions, ses interrogations et ses indignations sur la foi chrétienne et sur le sens de la vie humaine.
L'abbé Pierre s'y révèle fidèle à lui-même : homme passionné, d'une franchise et d'une lucidité extraordinaires. Il parle franc, il parle juste et se permet de dire librement sa pensée en évoquant:
les débordements de notre époque : le fanatisme religieux et la croisade absurde de Georges Bush…
l'évolutionnisme et les théories prophétiques du Père Teilhard de Chardin,
une papauté restée trop attachée aux apparats d'une puissance temporelle et qu'il invite à une fonction plus modeste…
un culte exagéré envers Marie dont il dit : « J'ai une immense tendresse pour Marie, la mère de Jésus. Je récite tous les jours ses paroles du Magnificat . Je l'associe souvent dans mes prières adressées à Dieu. Mais je ne peux concevoir qu'on lui voue un véritable culte, lequel finit, chez certains, par prendre plus de place que l'adoration envers le créateur. Cela devient alors de l'idolâtrie. »…
la place de la femme dans l'Eglise et son accession éventuelle à un ministère…
le célibat imposé uniquement aux prêtres catholiques romains. Le petit extrait où il parle du désir sexuel, et que les médias ont monté en épingle, ne représente qu'un infime détail qui, en fait, le grandit. C'est un homme vrai qui ne joue pas aux saintes nitouches.
Sur ces sujets comme sur bien d'autres, les accents de ce livre sont souvent pathétiques. Ceux d'un homme qui a côtoyé la misère durant toute sa vie et qui s'interroge chaque jour : pourquoi tant de souffrance ?
Il garde pourtant le regard serein et émerveillé d'un croyant qui, par-delà les doutes, s'appuie sur une foi inébranlable en un Dieu – Amour.
Le Christ d'Emmaüs l'a marqué à jamais. Et il trouve sa présence dans les plus humbles de ses frères comme aussi dans l'eucharistie.
Il termine par ces mots : « Père, j'attends depuis si longtemps de vivre dans votre totale PRESENCE qui est, je n'en ai jamais douté, malgré tout, AMOUR. »
Paul Spies
" Dieu n'a pas d'autres mains que les nôtres "
Georges Bernanos dans "Le scandale de la Vérité" |
DIDIER RIMAUD, un troubadour de Dieu |
Qui était Didier Rimaud ?
C'était un poète de grand talent, un de ces jésuites français qui échappent aux cadres traditionnels.
Vous ne le saviez sans doute pas, mais il était chanté dans toutes nos églises. C'est lui qui est l'auteur de nombreux chants liturgiques comme :
Fais paraître ton jour et le temps de ta grâce… (Y 53)
Allez dire à tous les hommes … (U 132)
Que tes oeuvres sont belles… ( A 219)
Si le Père nous appelle… (T 154)
Vienne la paix sur notre terre… (T 150)
Et bien d'autres…
Didier Rimaud avait étudié de très près ces poèmes extraordinaires que sont les psaumes. Dans la traduction de la Bible de Jérusalem, il avait mis en lumière leur rythme, leur structure et partageait ses découvertes avec passion.
Ce n'était pas un poète en chambre. Lors de grands événements, il était sur la brèche. C'est en mai 68 qu'il écrivit le chant “Ouvrez vos coeurs au souffle de Dieu” (K 79) où il exprime à chaud et avec son regard de croyant l'effervescence du moment :
“Livrez votre être aux germes d'Esprit
pour qu'il nous donne sa violence
à son service.”
Ses chants ont apporté à la liturgie un souffle de renouveau inspiré du Concile Vatican II. Les textes qu'il écrivit voici 30 ans sont toujours chantés dans les églises. Ils sont beaux et riches de sens. On n'y trouve pas de lieux communs. C'est là le secret de leur pérennité.
Auteur-compositeur, il se promenait, la guitare en bandoulière et partageait à travers ses chansons un message de foi humble et sincère.
Ainsi, dans “Vienne le temps d'aimer”, ou dans cette chanson où il exprime l'idéal de Saint François d'Assise :
“Je n'ai pas besoin des écus du roi,
J'ai poche vide
J'ai poche vide
Je n'ai pas besoin des écus du roi
J'ai poche vide et coeur en joie”.
Didier RIMAUD s'en est allé, mais son message reste actuel à travers tout son apport liturgique.
Paul SPIES
MARIE LAFORÊT. Elle est née en 1939 à Soulac en Gironde au sein d'une famille d'immigrés arméniens. Elle a à peine 20 ans lorsque sa carrière prend tournure : Plein Soleil (1959) avec Alain Delon et La fille aux yeux d'or (1961) révèlent ses talents de comédienne. La petite étoile repérée quelques années auparavant devient une star. S'en suivent alors plusieurs films, dont Flic ou voyou (1979), Joyeuses Pâcques (1984), Tikho Moon (1996) ou encore C'est la tangente que j'préfère (1997). Mais c'est la musique que Marie Laforêt préfère. C'est dans ce domaine que sa carrière d'artiste se confirme : son premier 45 tours, Les Vendanges de l'amour, sort en 1963 et obtient un succès immédiat dans le monde. Les disques s'enchaînent alors et tous fredonnent avec elle Viens sur la montagne , Manchester et Liverpool , Mon amour, mon ami , Ivan, Boris et moi ou encore Viens, viens ... |
« Je ne connais pas de dimension qui ne soit pas divine.
Les artistes sont les messagers de Dieu : c'est à nous de regarder et de faire savoir quelle est la marche du monde. Les arts ont cette volonté là.
Je crois qu'il y a une part de l'imaginaire artistique liée à Dieu.
Les artistes sont en permanence à l'écoute de Dieu : c'est notre seul guide. Croire c'est être dans l'assurance. Pour ma part, je n'ai aucun doute ; j'ai une confiance totale et aveugle.
Croire me fait rire, me rend gaie, me rend libre. »
François MARTOU, un grand passionné chrétien contemporainSon « Message pascal ». |
Comment jugez-vous le monde que vous laisserez à vos petits enfants ?
« Je peux leur dire que j'ai connu beaucoup d'ombres,
Mais que si on travaille pour la lumière,
il fera toujours plus clair demain.
Je ne peux pas leur dire que les ombres ont battu la lumière.
Je suis assez heureux et même fier
De ce que j'ai pu faire,
De ce que j'ai pu participer.
Je leur souhaite un monde plus fraternel et moins matérialiste.
Je suis un optimiste impénitent, mais lucide. »
Extrait de « Demain, il fera jour »
François Martou né le 4 avril 1943 et décédé le 1er mars 2009 jouissait d'une grande considération de tous et n'hésitait pourtant jamais à dire ce qu'il pensait, quand bien même il était en face de personnalités aux responsabilités importantes.
Toute sa carrière fut marquée par un engagement sans faille contre les inégalités et pour le progrès social.
|
Tu trouveras le soleil Yalla ! Elle m'emmène avec elle (mot qui signifie « Va de l'avant ») Chanson écrite en 2004 par Calogero |
|
Née à Bruxelles en 1908, Soeur Emmanuelle connaît une grande souffrance dès son plus jeune âges : sont père se noie sous ses yeux à Ostende alors qu'elle n'a que 6 ans.
Diplômée de sciences philosophiques et religieuses, elle entre chez les soeurs de N-D de Sion et prononce ses voeux à 23 ans.
Elle va enseigner tour à tour en Turquie, Tunisie et Egypte jusqu'à l'âge de 63 ans. C'est l'âge de la retraite. Mais pour elle une nouvelle vie commence.
Elle s'installe parmi les chiffonniers du Caire. Elle y consacrera 20 années au service des plus pauvres. Là, elle se rira de tous les dogmatismes, faisant jouer les enfants arabes et coptes au sein d'une même équipe, suscitant l'entraide et la solidarité entre tous, qu'ils soient juifs, musulmans, chrétiens ou athées. Elle force l'admiration des uns et des autres. Pionnière d'un oecuménisme universel, son action s'étend de l'Egypte au Soudan, du Liban aux Philippines, de l'Inde au Burkina Faso.
Ses tournées en Europe la rendent célèbre. Elle est reçue par les plus grands, est décorée de la légion d'honneur par Jacques Chirac, est créée Docteur honoris causa par l'UCL. Elle donne des conférences, visite les écoles et parle aux étudiants. (j'ai eu le plaisir de la recevoir dans mon école, au C.B.I.M.C, en 1997).
Elle écrit beaucoup. Plus d'une dizaine de livres :
En 1999, avec Françoise Huart, Yalla en avant les jeunes , Ed. LGF poche
En 2001, Les mots du rosaire , Ed. Actes Sud
En 2002 Chiffonnière avec les chiffonniers , Ed. de l'Atelier
Encore en 2002 avec Philippe Asso, Richesse de la pauvreté , Ed. J'ai lu
En 2003 Jésus tel que je le connais Ed. J'ai lu
En 2004 avec Marlène Tuininga, Le paradis, c'est les autres, Ed. J'ai lu. Un livre en réponse au succès littéraire « L'enfer, c'est les autres » du philosophe existentialiste Jean-Paul Sartre.
En 2005 Vivre, à quoi ça sert, Ed. J'ai lu
En 2007 avec Sofia Stril-Rever Mille et un bonheurs. Méditations de Soeur Emmanuelle Ed. Carnets Nord
En 2008 Une pensée par jour , Ed. Mediapaul
En 2008, tout récemment, J'ai cent ans et je voudrais vous dire … Ed. Plon.
Enfin, encore en 2008, au lendemain de sa mort et selon sa volonté, une dernière publication : Confessions d'une religieuse, Ed. Flammarion,
Elle est partie en grande simplicité durant la nuit du 19 au 20 octobre 2008, nous léguant son message de joie et d'enthousiasme et son regard de foi si positif sur la vie.
Paul Spies
LE PANIER DE LA SOLIDARITÉ |
Comme chaque année, durant l'Avent, le panier de la solidarité est au fond de notre église pour y recueillir des denrées non périssables et des vêtements qui iront aux plus démunis.
D'où vient cette idée ?
Vincent Depaule (c'est ainsi qu'il signait) n'a découvert sa voie que très lentement et, pour ainsi dire, à tâtons. Pendant 35 ans, sa vie est celle d'un cadet de Gascogne (il est né en 1581 à Pouy, près de Dax), est entré au séminaire pour faire carrière et trouver ensuite « une honnête retirade ».
Mais il va découvrir peu à peu la grande misère qui sévit au royaume de France : paysans affamés et mutinés, armées de vagabonds et de mendiants, milliers d'enfants abandonnés.
Il sera tour à tour aumônier général des galères, supérieur de l'ordre de la Visitation créé par St François de Sales, puis fondateur des Filles de la Charité.
C'était une première dans l'Eglise : une société de femmes non cloîtrées vouées à des tâches d'assistance sociale. Il leur donne un règlement révolutionnaire :
« Elles auront pour monastère, les maisons des malades,
pour cellule, une chambre de louage,
pour chapelle, l'église paroissiale,
pour cloître, les rues de la ville,
pour clôture, l'obéissance,
pour profession, la confiance continuelle dans la Providence, l'offrande de tout ce qu'elles ont. »
Il avait un respect extrême de la personne humaine :
« Ne vous occupez pas des prisonniers si vous ne consentez pas à être leurs sujets et leurs élèves. Ceux que nous appelons des misérables, ce sont eux qui doivent nous évangéliser et nous convertir. Après Dieu, c'est à eux que je dois le plus. »
On ne saurait oublier le fameux dialogue écrit par Jean Anouilh pour le film « Monsieur Vincent » joué par Pierre Fresnay :
« Jeanne, tu verras bientôt que la charité est lourde à porter, plus que le broc de soupe ou le panier plein. Mais tu garderas ta douceur et ton sourire. Ce n'est pas le tout de donner le bouillon et le pain. Cela, les riches peuvent le faire. Tu es la petite servante des pauvres, la fille de la charité toujours souriante et de bonne humeur. Ils sont les maîtres… Des maîtres terriblement exigeants, tu verras…
Alors, plus ils seront laids et sales, plus ils seront injustes et grossiers, plus tu devras leur donner de ton amour. Ce n'est que pour ton amour, pour ton amour seul, que les pauvres te pardonneront le pain que tu leur donnes. »
Voltaire dira plus tard : « Mon saint à moi, c'est Monsieur Vincent » et les Révolutionnaires de 1789 le sacreront « Grand bienfaiteur de l'humanité. »
En 1833, Frédéric OZANAM fonde les « Conférences St Vincent de Paul ». Elles regroupent des équipes de laïcs liés par l'amitié et dont le projet se résume en 3 mots : " Aimer - Partager - Servir ".
C'est donc en lien avec les Conférences St-Vincent de Paul de Rixensart que notre paroisse organise ce partage durant l'Avent et le Carême.
Paul Spies
Témoignages